A l’ombre des ruelles fréquentées, sous les douches de sodium des lampadaires, des silhouettes rôdent, fantômes de chairs laissant leurs empreintes éthérées sur la pellicule de Sinkai. Seules faces à elles-mêmes ou à leurs semblables, elles distillent leurs ombres. Découpes de carbone dans la lumière artificielle. L’homme face au monde, devant sa destinée éphémère. L’homme égaré dans sa mélancolie, qui le pousse à errer dans des non-lieux, des décors uniques car hors du temps, hors du monde ou tout du moins, à son intime bordure. En effet, les endroits photographiés par Sinkai ne sont, ni à la ville ni à la campagne, des entre deux, des lieux de liens, de canaux. Des invitations à la rêverie. Nous y voilà donc, l’homme qui cherche à imprimer ses rêves, non pas pour s’en souvenir, mais pour dire qu’il y était. Que oui ce corps fut bien présent dans ce songe, et que oui c’est ce songe qui fait marcher ce corps. Car on entre bien en pèlerinage dans une exposition de Sinkai. Ôtez vous de tout a priori, en terres inconnues, seule votre étoile vous guide, qu’elle soit réverbère ou feu grégeois. Je ne peux rien dire d’autre que loués soient les coeurs hardis et réjouis à l’idée de se perdre vraiment, d’aller aux confins de leurs mondes. Trop de voyageurs ont des buts, et Sinkai et ses racines Bretonnes/Gitanes ne le sait que trop bien. Lui seule sa Quête l’intéresse, l’obnubile. Vouloir pénétrer encore plus profond dans la coquille du réel, se jouer des apparences et des apparitions, ne garder que le vide, la brume, l’éther. La chimie opère et La résultante est là. Ce qui me frappe alors c’est la justesse du résultat, car en effet le propos de Sinkai résonne déjà dans sa propre Ethernité. Claude Ether - Palerme - 2010 |